Financé par

L'AFD, la Fondation de France, la Principauté de Monaco et la région Auvergne Rhône Alpes

Contexte et origines du projet

La fréquence, l’intensité et la nature même des catastrophes changent. Les ruptures en cours – climatique, politique et géopolitique, sanitaire, etc. – et souvent interconnectées questionnent les capacités des acteurs classiques de la réponse à intervenir. Les pays qui se croyaient protégés ou du moins préparés à ces crises prennent conscience que les secours et les institutions ne sont pas prêts face aux nouveaux risques systémiques. 

Dans le même temps, bien souvent, les populations exposées, non préparées ni formées à vivre ces ruptures, s’entraident et s’auto-organisent dans la crise par des processus spontanés, endogènes et informels. L’exemple du COVID a marqué les esprits en mettant en lumière le potentiel d’organisation des citoyens et des acteurs locaux face à une situation pourtant inédite. Ces mêmes dynamiques sont régulièrement observées dans les contextes de crise et ont été étudiées lors des évaluations du Groupe URD ainsi que par plusieurs chercheurs en sciences sociales1

Cependant, la longue expérience du Groupe URD dans l’évaluation des interventions humanitaires montre que les acteurs extérieurs ne prennent pas toujours en compte ce potentiel, et ce faisant, peuvent fragiliser ces dynamiques endogènes. Cela s’explique notamment par la méconnaissance des mécanismes locaux qui régulent l’entraide. À partir d’études de cas basées sur des contextes de crise spécifique, il s’agit donc de mieux comprendre les processus à l’œuvre afin de donner des pistes de recommandations opérationnelles pour les citoyens/individus et les organisations/acteurs de la réponse. 

 

Ce projet est né de la rencontre entre l’équipe du Groupe URD et Pablo Servigne, notamment lors des Universités d’Automne de l’Humanitaire en 2019 sur le sujet « Enjeux climatiques, multiplication des crises et effondrement ; comment le secteur de l’aide doit-il anticiper et s’adapter aux bouleversements à venir ? » et celles de 2021 sur le sujet « Solidarités locales, entraide et citoyenneté : la face oubliée de la réponse aux crises ? ».  

Il se situe au croisement des réflexions : 

  • Du Groupe URD qui travaille depuis longtemps sur les questions de crises et de fragilités, de participation des populations dans les programmes d’aide (« Bénéficiaires ou partenaires : quels rôles pour les populations dans l’action humanitaire ? » Groupe URD, Éditions Karthala, 2005 ; Manuel de la participation à l’usage des acteurs humanitaires, ALNAP & Groupe URD, 2009) et sur les enjeux de localisation de l’aide.  
  • Et celles de Pablo sur les crises, les risques d’effondrement et sur l’entraide (« Comment tout peut s’effondrer », 2015, « L’entraide, l’autre loi de la jungle », 2017, « Une autre fin du monde est possible » 2018). 

Les évaluations réalisées depuis par le Groupe URD au Liban deux semaines après l’explosion du port de Beyrouth en août 2020, dans la vallée de la Roya cinq jours après le passage de la tempête Alex à l’automne 2020 et en Ukraine à l’été 2022 ont toutes souligné encore l’importance de la réponse citoyenne dans les crises.  

 

Objectifs de la recherche

Plusieurs études de cas visent donc à analyser et documenter les mécanismes endogènes d’entraide en contexte de crise et comprendre leur articulation avec les interventions de l’aide institutionnelle. Elles ont lieu sur différents contextes/continents et différents types de crise (catastrophe naturelle, conflit, déplacements de population), afin de rendre compte de la diversité des pratiques et des comportements des populations affectées. Dans chaque pays, deux études de cas correspondant à deux situations de crise spécifique, ancrées sur un territoire donné (village, quartier), sont réalisées. 

Il s’agit plus spécifiquement de :

  • Analyser les stratégies endogènes d’entraide en fonction du type de crise et des contextes socio-politiques dans lesquelles elles s’insèrent ;
  • Analyser les dynamiques d’entraide et leurs évolutions selon la temporalité de la crise ou de la catastrophe (avant, après, pendant) ;
  • Identifier les perceptions des populations vis-à-vis de la crise et interroger « la mémoire collective » ;
  • Comprendre comment l’aide « extérieure » (internationale et institutionnelle) s’adapte aux logiques informelles d’entraide. 

Les résultats de ces travaux sont destinés aux citoyens/individus et organisations/acteurs de la réponse, dans une perspective de préparation face aux risques et d’amélioration des interventions, en particulier dans les interactions entre acteurs extérieurs et les communautés touchées par les crises.

 

Les individus et les institutions suivants sont ciblés par l’étude :  

  • Habitants des villages et quartiers concernés. 
  • Associations villageoises et collectifs citoyens. 
  • Collectivités locales depuis le niveau municipal jusqu’au niveau national.  
  • Services techniques de l’État concernés par la crise (ministère de la Santé, de l’Intérieur) au niveau central et décentralisé/déconcentré.
  • Sécurité civile. 
  • Acteurs de l’aide internationaux et nationaux. 

 

Il s’agira ensuite de favoriser la prise de conscience de ces phénomènes spontanés, la préparation, et les capacités d’action des citoyens, des habitants et des acteurs des territoires en diffusant les résultats de ces travaux auprès du grand public via différents supports (vidéos, événements et différents supports de communication) et en leur fournissant des outils, tels que manuel, atelier de sensibilisation ou formations. 

 

Ce projet de recherche opérationnelle est intégré au projet « Apprendre et Innover face aux Crises – phase 3 » (2022- 2025), projet de Structuration du Milieu Associatif co-financé par l’AFD, la Fondation de France, la Principauté de Monaco et la région Auvergne Rhône Alpes. 

  1. Voir notamment : Revet Sandrine, Anthropologie d’une catastrophe. Les coulées de boue de 1999 au Venezuela, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2007 ; Desportes Isabelle, Craindre le politique : la réponse humanitaire aux catastrophes dites « naturelles » en Birmanie (2015), Éthiopie (2016) et au Zimbabwe (2016-2019), Cahiers d’Outre Mer, 2022 ; et Corbet Alice, Les différentes dimensions de la mémoire du séisme de 2010 en Haïti, Entre pratiques du quotidien et tentatives de mises en mémoire officielle, L’Espace Politique, 2020)

Réalisé par

Florence Chatot

Chargée de recherche, d'évaluation et de formation (depuis 2019)

Véronique
Véronique de Geoffroy

Directrice générale (salariée depuis 1999)

VL
Valérie Léon

Chargée de recherche et d’évaluation (depuis 2012)